Le service de pédiatrie de l’hôpital de Cayenne a obtenu 200 000 euros du Programme hospitalier de recherche clinique Interrégional (PHRC-I). C’est la première fois que le CHC est lauréat de cet appel à projets. Ce financement lui permettra de tester l’hypnose avec des casques de réalité virtuelle. Le but est de prévenir la douleur liée aux soins chez l’enfant, notamment chez ceux souffrant de drépanocytose.

Imaginez que vous naviguez en pirogue sur un fleuve au milieu de la forêt guyanaise. Que vous dévalez les cimes enneigées des Alpes. Ou que vous vous promenez dans les rues de Paris. Plongé dans les images de votre casque de réalité virtuelle, vous n’avez pas remarqué qu’une infirmière vous avait piqué. Le service de pédiatrie du Centre hospitalier de Cayenne va tester l’adhésion à ce dispositif chez des enfants de 7 à 16 ans devant recevoir des soins douloureux.&nbsp;<figure class="image image_resized image-style-align-left" style="width:222px;"><img src="/uploads/Narcisse_Elenga_f08a52253c.jpg" alt="Narcisse Elenga.jpg"><figcaption>Pr Narcisse Elenga</figcaption></figure>«&nbsp;Pour les soins douloureux chez l’enfant, des pansements ou des soins de brûlure, on peut prévenir la douleur avec des patchs de lidocaïne et un gaz hilarant.&nbsp;» C’est le gold standard, c’est-à-dire la meilleure technique disponible actuellement, explique le Pr Narcisse Elenga, chef de service de pédiatrie au CHC.&nbsp; «&nbsp;Mais pour utiliser le gaz hilarant, qu’on appelle Meopa, il faut que l’enfant adhère, puisqu’il va devoir respirer dedans. Ce n’est donc pas possible, par exemple, en dessous d’un certain âge.&nbsp;» La technique n’est pas parfaite non plus. «&nbsp;Certains enfants, diabétiques ou souffrant de drépanocytose, ont besoin de prises de sang régulières. On ne peut pas utiliser le gaz hilarant systématiquement, à cause du risque d’effets secondaires.&nbsp;»&nbsp;Les soignants ont donc cherché d’autres techniques, comme l’hypnose. Au CHC, plusieurs infirmières maîtrisent cette pratique. Mais outre qu’il faut du personnel formé et disponible, tout le monde ne répond pas à l’hypnose. C’est ainsi qu’a germé l’idée de faire appel aux casques de réalité virtuelle. «&nbsp;L’enfant se met dans un environnement immersif, comme un jeu. Il oublie tout et ne se rend pas compte qu’il a été piqué&nbsp;», détaille le Pr Elenga.&nbsp;Dans les mois qui viennent, lui et ses collègues vont comparer l’hypnose avec casque de réalité virtuelle au gold standard. L’essai, nommé VRaPPP (pour Virtual Reality as Pain Prevention in Pediatrics ou la réalité virtuelle comme moyen de prévention de la douleur en pédiatrie) se déroulera dans les services d’urgences et de pédiatrie des hôpitaux de Cayenne, Kourou et Saint-Laurent du Maroni, ainsi qu’au centre de soins drépanocytose du CHC. «&nbsp;Tous les enfants recevront le patch de crème. Puis, par tirage au sort, ils recevront soit le Meopa, soit le casque de réalité virtuelle, détaille le Pr Elenga. On mesurera la douleur avant et après le soin, puis on appellera l’enfant les jours suivants pour savoir comment il va et vérifier s’il a des effets secondaires. L’objectif est de vérifier que l’hypnose avec casque de réalité virtuelle n’est pas inférieure au gold standard. S’il y a moins d’effets secondaires, on pourra alors proposer les deux techniques.&nbsp;» Le projet vise ainsi à diminuer l’utilisation de médicaments chez les enfants et à en limiter les effets indésirables.&nbsp;&nbsp;&nbsp;

Chaque année, depuis 1993, le ministère de la Santé lance un appel à projets de recherche. C’est le Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) et sa déclinaison interrégionale (PHRC-I). Il permet aux équipes hospitalières de déposer des dossiers en vue d’obtenir leur financement. Le processus est très sélectif et fait la part belle aux centres hospitaliers universitaires (CHU). Cela n’a pas empêché le CHC de présenter plusieurs projets. Avec l’essai sur l’hypnose par casque de réalité virtuelle (VRaPPP), c’est la première fois qu’il est lauréat au titre du PHRC-I. L’an dernier, deux autres projets de recherche du CHC avaient été retenus au titre du PHRC.&nbsp;&nbsp;«&nbsp;Nous avions déjà présenté le projet VRaPPP en 2021 et 2022, retrace le Pr Narcisse Elenga. A chaque fois, nous avions une bonne note lors de la première étape de la sélection. Mais ensuite, le jury trouvait que nous n’étions pas assez précis dans le choix des patients participant. Nous avons revu l’argumentaire et nous avons été acceptés cette année, à la troisième tentative.&nbsp;»&nbsp;Parmi les 41 projets présentés cette année, 15 ont été retenus. Les promoteurs du projet de recherche recevront environ 200 000 euros, qui couvriront les besoins de cette étude. Certains casques de réalité virtuelle, financés par la Collectivité territoriale de Guyane (CTG), sont déjà à l’hôpital de Cayenne. Le Pr Elenga espère un démarrage de l’étude début 2024.