Grâce à quelques signes cliniques une prise de sang et une radio des poumons, les médecins peuvent désormais détecter plus facilement les cas d’histoplasmose qui vont évoluer défavorablement, chez les personnes vivant avec le VIH. Cet outil, que l’hôpital de Cayenne a mis à disposition de tous les médecins dans le monde, permet de choisir le traitement le plus adapté aux patients.

<figure class="image image_resized" style="width:628px;"><img src="/uploads/histoplasmose_5_cb65d045e5.jpg" alt="histoplasmose 5.jpg"></figure>Et si, avec un examen clinique classique et quelques examens faciles à réaliser, on pouvait prédire comment va évoluer une maladie&nbsp;? C’est l’objectif des «&nbsp;scores&nbsp;»&nbsp;! Le patient passe une série d’examens, le médecin attribue des points en fonction du résultat&nbsp;: au-dessus d’un certain «&nbsp;score&nbsp;», le soignant peut supposer que la maladie sera sévère, voire entraînera le décès du patient&nbsp;; en dessous, le soignant peut anticiper une évolution favorable de la maladie. Un tel score vient d’être élaboré à l’hôpital de Cayenne pour l’histoplasmose associée au VIH. Il a été présenté par Ugo Françoise, interne en maladies infectieuses, lors des Journées des soignants, fin mai 2023.&nbsp;L’histoplasmose est une infection provoquée par un champignon. La maladie est dite «&nbsp;opportuniste&nbsp;»&nbsp;: alors que ce champignon, très présent dans l’environnement, n’a le plus souvent pas d’effet sur la plupart d’entre nous, il s’attaque aux personnes dont le système immunitaire est fragile. C’est le cas des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). C’est même l’infection opportuniste la plus fréquente chez les PVVIH dans notre région. «&nbsp;En Amérique latine, l’histoplasmose serait responsable de plusieurs dizaines de milliers de décès depuis le début de l’épidémie à VIH, plus particulièrement dans la région amazonienne et le plateau des Guyanes&nbsp;», précise le Pr Antoine Adenis, chef de pôle santé publique et recherche à l’hôpital de Cayenne, suite à des estimations publiées dans le Lancet Infectious Diseases Journal. https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(18)30354-2/fulltext. Il y a quelques années, en Guyane, près d’un PVVIH sur deux atteint d’histoplasmose en mourait (40 %). Aujourd’hui, c’est dix fois moins (3,5 %). «&nbsp;Mais dans beaucoup de pays d’Amérique latine, la mortalité reste à 30 ou 40 %, voire 60 % comme au Guatemala&nbsp;», poursuit le Pr Adenis.&nbsp;Deux traitements existent&nbsp;: un traitement oral et un traitement intraveineux. Le premier est peu cher, ne provoque guère d’effets secondaires mais n’est pas assez efficace contre les formes graves. Le second, c’est tout l’inverse&nbsp;: il est cher, peut provoquer des effets secondaires mais est efficace contre les formes graves. Dans ces conditions, il n’est pas question de le donner à tous les patients. «&nbsp;Certains pays ne peuvent pas utiliser sans compter le traitement le plus efficace à cause de son prix, souligne Ugo Françoise. Et si, à cause des effets secondaires, il générait des complications chez un patient peu grave, ce serait une catastrophe&nbsp;!&nbsp;»&nbsp;Il faut donc pouvoir anticiper l’évolution de la maladie. «&nbsp;Jusqu’à présent, ce choix se faisait sur la base de l’expérience du médecin, constate le Pr Adenis. Cela pose un problème avec les internes ou avec les nouveaux médecins qui n’ont pas vu beaucoup d’histoplasmose dans leur carrière.&nbsp;» Il n’est pas possible non plus d’attendre que la maladie commence à évoluer pour choisir le traitement&nbsp;: «&nbsp;La maladie va souvent monter discrètement puis, à un moment, ça bascule du mauvais côté, décrit le Pr Adenis. Certaines personnes arrivent sur leurs pieds à l’hôpital et décèdent dans la semaine.&nbsp;»&nbsp;Des tentatives d’identifier des facteurs associés aux formes sévères de la maladie ont été proposées par le passé, constats utiles d’une expérience au lit du malade mais qui ne se révélaient pas utiles pour permettre de changer les pratiques des médecins. Ce que change le travail d’Ugo Françoise et de ses collègues, c’est que le nouveau score est facile à réaliser quel que soit le niveau de développement du pays d’exercice et prédit assez bien l’évolution de la maladie. Cela faisait une dizaine d’années que le Pr Adenis espérait développer un tel outil, qu’il évoquait déjà dans sa thèse d’Université. https://theses.hal.science/tel-01832278&nbsp;&nbsp;Pour obtenir ce score, Ugo Françoise s’est penché sur les données de 415 patients de la base de données VIH-histoplasmose de Guyane. Parmi eux, 56 étaient morts dans le mois suivant le début du traitement. C’est en regardant leurs caractéristiques qu’il a pu déterminer les sept critères les plus efficaces pour prédire l’évolution de la maladie. Un examen clinique classique, une simple prise de sang et une radio des poumons suffisent pour les obtenir, ce qui signifie que ce score peut être calculé à peu près partout dans le monde. Des points – au maximum douze – sont attribués. «&nbsp;Chez les patients ayant un score au moins égal à 5, 33 % étaient vraiment graves. Avec un score inférieur à 5, 97 % des patients étaient non graves.&nbsp;» Il y a donc peu de risque de ne pas détecter un cas grave au seuil définit. Le médecin pourra alors décider du traitement. Si le traitement oral est choisi, «&nbsp;il faut quand même surveiller le patient, surtout la première semaine. C’est là que tout peut se dégrader.&nbsp;»&nbsp;Le travail de l’hôpital de Cayenne a été publié dans une revue scientifique internationale avec revue par les pairs. https://www.ijidonline.com/article/S1201-9712(23)00127-3/fulltext Les médecins peuvent déjà l’utiliser en utilisant un calculateur gratuitement disponible en ligne. https://cicec-antilles-guyane.org/hfs/ Il reste à présent à l’équipe du Centre Hospitalier de Cayenne une étape de validation externe du score&nbsp;: des collaborations sont en cours de développement pour tester la capacité du score à prédire l’évolution de la maladie sur des séries de cas d’histoplasmose au Guatemala, en Colombie, au Brésil et en Argentine&nbsp;! En avril 2020, au tout début de la pandémie de Covid-19, l’Organisation mondiale de la santé avait publié des recommandations mondiales pour le diagnostic et le traitement de l’histoplasmose chez les personnes vivant avec le VIH, grâce notamment aux travaux et au plaidoyer développés par l’équipe de l’hôpital de Cayenne. https://www.who.int/publications/i/item/9789240006430 A l’avenir, ce score, s’il confirme son efficacité, pourrait y être ajouté.&nbsp;

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Grave, pas grave ? Un outil pour prédire l’évolution de l’histoplasmose

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