Fin 2022, l’étude Orpal 3 a été menée dans les bases arrières de l’orpaillage clandestin, sur le Maroni et l’Oyapock, afin de connaître la situation du paludisme et l’état de santé des orpailleurs clandestins. Cette étape était indispensable avant de lancer l’intervention Curema.

Aller à la rencontre des orpailleurs clandestins. Voici une étape incontournable si la Guyane veut éliminer le paludisme, comme la France s’y est engagée auprès de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). C’est ce que font les équipes du projet Malakit depuis 2015.&nbsp;<img class="image_resized image-style-align-left" style="width:249px;" src="/uploads/31906004_200770290715605_6588918180721197056_n_28ed858f87.jpg" alt="31906004_200770290715605_6588918180721197056_n.jpg">Malakit est un projet qui a permis de distribuer des kits aux orpailleurs clandestins pour qu’ils se diagnostiquent eux-mêmes s’ils avaient les symptômes du paludisme, puis qu’ils se soignent eux-mêmes en cas de résultat positif. Entre avril 2018 et juillet 2020, plus de 4 500 kits ont été distribués à 3&nbsp;471 personnes. Deux études, Orpal 1 et Orpal 2, ont été réalisées avant et après la distribution des kits. Elles ont permis de constater une forte diminution du paludisme chez les orpailleurs clandestins travaillant en Guyane. Avant la distribution des kits, près d’un sur quatre (22,3 %) étaient porteurs du parasite du paludisme. Après la distribution des kits, ce n’était plus qu’un sur vingt (5,3 %) dans la région du Maroni. L’un des objectifs de cette distribution était d’éviter qu’ils ne prennent des médicaments sans savoir s’ils étaient vraiment infectés. En effet, prendre inutilement des médicaments fait courir le risque que le parasite responsable du paludisme le plus grave, Plasmodium falciparum, devienne de plus en plus résistant au médicament utilisé pour l’éliminer (l’artémisinine).<img class="image_resized image-style-align-right" style="width:444px;" src="/uploads/Malakit_bf3c0e50f6.png" alt="Malakit.png">&nbsp;Aujourd’hui, le projet Malakit se lance un nouveau défi. Il s’agit de lutter contre l’autre espèce de parasite responsable du paludisme&nbsp;: Plasmodium vivax. Celui-ci est connu pour les rechutes qu’il provoque chez les personnes infectées, pendant de nombreuses années en l’absence de traitement radical anti-rechutes. Ce nouveau volet du projet s’appelle Curema.&nbsp;Là aussi, deux études sont menées avant et après la réalisation de l’intervention&nbsp;: Orpal 3, qui s’est déroulée en fin 2022, et Orpal 4, qui aura lieu en 2024.&nbsp;<h4>&nbsp;</h4><h4>Les projets Malakit et CUREMA sont cofinancés par le Centre Hospitalier de Cayenne, les fonds européens en Guyane&nbsp;(PCIA Synergie:&nbsp;3949,&nbsp;7128 et&nbsp;8754), l'Agence Régionale de Santé Guyane, l'Agence Française de Développement, le Fonds Mondial&nbsp;de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, l'Organisation Panaméricaine de la Santé (OPS-OMS), les ministères de la santé du Suriname et du Brésil. "</h4>

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Fin 2022, des médecins, infirmiers et médiateurs de l’hôpital de Cayenne sont allés à la rencontre des garimpeiros, sur les sites où ils organisent leur logistique et/ou se reposent, côté Suriname et Brésil. Le but était de connaître leur état de santé, avant le lancement, ces jours-ci, de Curema, qui vise à faire reculer le paludisme.&nbsp;&nbsp;<figure class="image image_resized image-style-align-left" style="width:179px;"><img src="/uploads/IMG_20220919_WA_0036_f4499e3750.jpg" alt="IMG-20220919-WA0036.jpg"></figure>Transamerica, Yao Pasi, Texas… Le long du Maroni, côté Suriname, ces sites sont connus comme étant des bases arrières de l’orpaillage clandestin. C’est là que les garimpeiros peuvent se reposer, s’équiper, organiser le transport de marchandises, éventuellement échanger leur or. C’est là aussi qu’une équipe de l’hôpital de Cayenne, composée d’un médecin, d’un infirmier et d’un médiateur, s’est rendue pour étudier l’état de santé des orpailleurs clandestins et leur poser des questions sur leurs conditions de vie. Une autre équipe a fait le même travail le long de l’Oyapock, à la frontière avec le Brésil.&nbsp;&nbsp;Cette étude, appelée Orpal 3, avait pour but de faire un état des lieux de l’état de santé des orpailleurs, en particulier vis-à-vis du paludisme. A présent, l’intervention Curema va débuter, associant la distribution de kits aux orpailleurs clandestins pour qu’ils puissent se diagnostiquer eux-mêmes et se traiter eux-mêmes pour le paludisme. Les personnes à risque de rechute recevront un traitement radical du Plasmodium vivax, après s’être assuré de l’absence de contre-indication. Fin 2024, une nouvelle étude, Orpal 4, permettra de voir si leur état de santé s’est amélioré et si le paludisme a reculé grâce à ce nouveau projet Curema.&nbsp;&nbsp;<figure class="image image_resized image-style-align-left" style="width:253px;"><img src="/uploads/IMG_20220928_WA_0028_2bde951045.jpg" alt="IMG-20220928-WA0028.jpg"></figure>Cheveux, prise de sang, questionnaire…Teddy Bardon, infirmier, a participé à Orpal 3, côté Maroni. Tout comme Lorraine Plessis, coordinatrice d’étude clinique à l’hôpital de Cayenne. Chaque semaine, le même scénario se déroulait dans un site différent&nbsp;: «&nbsp;Nous partions en pirogue avec notre matériel. Nous cherchions un endroit où nous installer et notre médiateur partait à la rencontre de potentiels participants à l’étude, expliquent-ils. Ces personnes nous disaient si elles acceptaient de participer à l’étude et remplissaient des documents pour le confirmer. Puis elles répondaient au questionnaire&nbsp;; l’infirmier leur prélevait des cheveux et leur faisait une prise de sang. Nous tendions une bâche et installions un lit derrière, pour que le médecin puisse l’ausculter.&nbsp; Nous revenions en fin de semaine à Cayenne pour déposer les échantillons biologiques (cheveux, prises de sang) au niveau du Centre de Ressources Biologiques Amazonie de l’hôpital de Cayenne. Et le lundi suivant, nous partions sur un nouveau site.&nbsp;»&nbsp;Ces déplacements n’ont pas été de tout repos. On se souvient qu’en octobre dernier, les avions d’Air Guyane ne pouvaient pas atterrir à Maripasoula, à cause de l’état de la piste, puis à cause de la grève du personnel. «&nbsp;Nous nous sommes arrangés avec les CDPS (centres délocalisés de prévention et de soins) pour transporter l’équipe jusqu’à Maripasoula, qui était le site le plus important pour notre étude&nbsp;», se souvient Lorraine Plessis.&nbsp;Une fois sur place, il s’agissait d’expliquer aux orpailleurs clandestins pourquoi une équipe de l’hôpital de Cayenne venait sur ces sites et les objectifs de l’étude. Puis de leur demander s’ils acceptaient de participer après les avoir informés de leurs droits vis-à-vis de leur éventuelle participation à l’étude. Que les études cliniques se passent dans une chambre de l’hôpital ou au fin fond de la forêt, les règles à respecter sont les mêmes&nbsp;!«&nbsp;C’était le rôle du médiateur. Un rôle vraiment important, souligne Teddy Bardon. Quand nous arrivions, il faisait le tour du site, discutait pour savoir si de nouvelles personnes étaient arrivées, demandait si certaines étaient d’accord pour participer. Quand il repérait quelqu’un plutôt curieux, il lui montrait les documents et nous tachions de démarrer rapidement. Les autres regardaient, voyaient que nous étions là pour leur santé et souvent acceptaient à leur tour.&nbsp;»&nbsp;<figure class="image image_resized image-style-align-left" style="width:317px;"><img src="/uploads/IMG_20220919_WA_0008_1206a25681.jpg" alt="IMG-20220919-WA0008.jpg"></figure>Beaucoup d’orpailleurs se souvenaient de MalakitPassé ces premiers regards interrogatifs, les choses se sont toujours bien passées, assure l’infirmier. «&nbsp;Ceux qui étaient inquiets et qui n’étaient pas intéressés s’éloignaient, en général. Très souvent, le midi, ils nous offraient le repas. Certains nous disaient que c’était bien que l’on s’intéresse à leur santé !&nbsp;» Lorraine Plessis précise&nbsp;: «&nbsp;Même si nous faisons de la recherche, il y avait aussi une partie de soins. Et ça, ça les intéressait.&nbsp;»&nbsp;Au fil des semaines, l’équipe de l’hôpital a commencé à être connue le long du fleuve. «&nbsp;La première personne que nous avons incluse dans l’étude, à Albina, nous l’avons ensuite retrouvée plus haut sur le Maroni. C’était une personne ressource&nbsp;: elle nous signalait les groupes d’orpailleurs arrivés la veille au soir, leur expliquait ce que nous faisions et nous envoyait des personnes intéressées pour participer à l’étude&nbsp;», apprécie Teddy Bardon.&nbsp;Certains garimpeiros se souvenaient avoir participé aux études Orpal 1 et Orpal 2, en 2015 et 2019. Pour ceux qui ne comprenaient pas vraiment ce que l’équipe de l’hôpital de Cayenne faisait là, un mot suffisait souvent à les éclairer&nbsp;: Malakit. Beaucoup avaient entendu parler de ces kits distribués entre 2018 et 2020 aux orpailleurs clandestins pour leur permettre de diagnostiquer eux-mêmes le paludisme et, en cas de résultat positif, de se traiter eux-mêmes. Au total, 539 orpailleurs clandestins ont participé à l’étude Orpal 3&nbsp;: 328 sur le Maroni et 211 sur l’Oyapock. Les données recueillies par les équipes de l’hôpital permettront de mieux connaître leur état de santé et, en fin d’année prochaine, après la nouvelle distribution de kit, de voir si le paludisme a encore reculé.&nbsp;&nbsp;&nbsp;

L’étude Orpal 3 cherche à savoir beaucoup de choses sur la santé des orpailleurs clandestins, avant que ne soit lancé le projet Curema qui vise à faire reculer le paludisme dans cette population. Avec les cheveux, il sera possible de détecter la présence de mercure et de plomb, deux métaux aux conséquences catastrophiques quand on en a trop dans le corps. Un test rapide paludisme était proposé aux personnes présentant une fièvre ou une altération de l’état général. Les prélèvements de sang permettront également de rechercher le mercure et le plomb, mais aussi une infection au paludisme, les infections sexuellement transmissibles (VIH, hépatites…), les zoonoses (maladies transmises par les animaux telle la leptospirose…). Le poids et la tension étaient également mesurés. Le médecin proposait un examen général. Enfin, un questionnaire s’intéressait à leur mode de vie&nbsp;: ce qu’ils mangent, s’ils chassent, pêchent, quelle eau ils boivent, comment ils font leurs besoins, s’ils ont des contacts avec les animaux et les insectes, ce qu’ils font de leurs déchets…&nbsp;<figure class="image image_resized image-style-align-left" style="width:334px;"><img src="/uploads/20220920_124221_7320fc9afc.jpg" alt="20220920_124221.jpg"><figcaption>Crédit photo : CHC</figcaption></figure>Sur place, les équipes mesuraient également la glycémie, c’est-à-dire la quantité de sucre dans le sang. Et aussi la G6PD. Il est indispensable de connaître l’activité de cette enzyme avant de délivrer un traitement anti-rechute aux garimpeiros dans le cadre du projet Curema.&nbsp;«&nbsp;Dans le cadre de Malakit, nous distribuions des kits permettant de se diagnostiquer et se traiter en cas de symptômes du paludisme en zone isolée, que ce soit lié au falciparum ou au vivax. Dans le projet Curema on ajoute un traitement pour empêcher les rechutes due au vivax, explique le Dr Maylis Douine, qui coordonne le projet. Mais ce traitement, la primaquine, doit être pris une fois par jour pendant quatorze jours. Cela pose un problème d’observance.&nbsp;» C’est-à-dire que certaines personnes infectées oubliaient parfois de prendre leur traitement pendant un ou plusieurs jours.&nbsp;«&nbsp;Avec Curema, nous utilisons une nouvelle molécule&nbsp;: la tafénoquine, poursuit le médecin. Elle reste dans le sang pendant quatorze jour. Une seule dose suffit. Mais il y a des contre-indications. C’est pourquoi nous faisons le test G6PD.&nbsp;»&nbsp;Après cette étude Orpal 3 visant à une évaluation avant l’intervention à l’aide de kit, le projet Curema peut à présent démarrer ! Nous vous en parlerons dans les prochains mois.&nbsp;&nbsp;&nbsp;