En Guyane, l’histoplasmose est la première infection opportuniste chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH). 

En Guyane, l’histoplasmose est la première infection opportuniste chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH). Si la mortalité a très fortement reculé en Guyane – 3,5 % de décès – elle demeure très élevée dans de nombreux pays d’Amérique latine&nbsp;: 30 % à 60 % des patients décèdent. Il existe peu de traitements. Pour tester des alternatives aux traitements actuellement recommandés, le Dr Frédégonde About et le Pr Olivier Lesens, infectiologues au Centre Hospitalier de Cayenne, ont initié le projet Stratosphère en collaboration avec des chercheurs de la Fiocruz, le principal organisme de recherche médicale au Brésil. Ce projet a bénéficié d’un contrat d’initiation de l’ANRS-MIE (agence autonome de l’Inserm) en janvier 2024 avec pour objectif principal la mise en œuvre d’une collaboration de haut niveau et la rédaction d’un projet finalisé pour une demande de financement en septembre 2024.&nbsp;&nbsp;Durant ce projet, il s’agira de comparer deux traitements aux recommandations actuelles et de s’assurer qu’ils ne sont pas inférieurs. Il s’agira d’un essai médicamenteux, randomisé – les patients recevront l’un ou l’autre des traitements – et multicentrique, c’est-à-dire avec plusieurs centres participant. Avec ce contrat d’initiation, l’ANRS-MIE a attribué 20&nbsp;000 euros aux chercheurs pour un an. «&nbsp;Ce financement sert à lever les projets&nbsp;: on a une idée originale, avec des partenaires mais qui nécessite d’être affinée et structurée. Nous pouvons ainsi mener des missions, acheter du matériel, payer des ressources humaines&nbsp;», expliquent-ils. Ils ont rencontré des méthodologistes internationaux, consolider la coopération avec la Fiocruz, nouer des partenariats avec des équipes travaillant sur les études médico-économiques. En novembre, les deux infectiologues se rendront chez leurs partenaires brésiliens.&nbsp;Au cours de cette année, le Dr About et le Pr Lesens ont également lancé plusieurs études préparatoires&nbsp;: une étude de faisabilité pour montrer que le projet est réalisable, un questionnaire international pour connaître les pratiques actuelles, une étude pour savoir si les centres avaient déjà utilisé la future molécule à l’étude contre l’histoplasmose, une autre médico-économique sur le parcours de soins des PVVIH ayant contracté l’histoplasmose, et une pour évaluer les modalités d’utilisation des tests diagnostiques. «&nbsp;Toutes ces études vont nous aider à consolider le projet. Il faut montrer qu’il est réalisable. Ce contrat d’initiation nous en a donné les moyens.&nbsp;»&nbsp;Le projet Stratosphère, s’il voit le jour, durera trois ans pour les inclusions dans de nombreux centres, puis un an au moins pour l’analyse des résultats. L’ANRS dira début 2025 si elle accepte de le soutenir.&nbsp;<h4 style="text-align:justify;">Financement&nbsp;: Centre Hospitalier de Cayenne, ANRS-MIE.</h4><h4 style="text-align:justify;">Partenaires&nbsp;: Fiocruz (Brésil), Université de Bordeaux, CERDI, Expertise France, CHU de Martinique, CHU de Guadeloupe, centre de pharmacovigilance du CHU de Reims, Université de Guyane, CRB Amazonie, CIC-Inserm1424, laboratoire TBip, ANRS (coopération France-Brésil).</h4>

Le traitement actuel contre les formes sévères d’histoplasmose chez les personnes vivant avec le VIH est efficace. Mais il multiplie les inconvénients&nbsp;: il s’administre par voie intraveineuse, est cher – près de 500 euros par jour –, dure longtemps – deux semaines – et peut entraîner des effets secondaires. Pour de nombreux pays, il est tout simplement inaccessible financièrement voire non disponible pour de multiples raisons, comme l’ont montré les réponses à un questionnaire diffusé par le Dr About et le Pr Lesens auprès de spécialistes du monde entier. «&nbsp;Ce que nous souhaitons savoir, c’est si deux alternatives peuvent être utilisées chez des patients sévères, hospitalisés mais qui ne sont pas en réanimation », explique le Dr About.&nbsp;Ces deux alternatives sont soit un traitement oral (des cachets) soit un traitement intraveineux mais à plus forte dose, suivi du traitement oral. Ce traitement à plus forte dose est déjà utilisé pour d’autres infections.&nbsp;«&nbsp;L’idée est de faciliter l’accès au traitement&nbsp;», poursuit le Pr Lesens. «&nbsp;Il est beaucoup plus facile et moins cher de donner du posaconazole, qui est un traitement oral, qu’un traitement intraveineux. Si on arrive à montrer qu’il est non inférieur, cela permettrait d’améliorer l’accessibilité aux soins, de faire faire des économies aux hôpitaux et de réduire les durées d’hospitalisation. En Amérique latine, ce serait un élément très important.&nbsp;» En outre, souligne le Dr About, «&nbsp;cela permettrait de tester une alternative. Aujourd’hui, il n’y a qu’un traitement recommandé. Il n’y a pas de deuxième ligne dans les situations où les traitements sont mal tolérés, ou s’il y a des interactions médicamenteuses… Cela permettrait de prouver de manière rigoureuse que ce traitement peut être utilisé.&nbsp;»

Le Dr Frédégonde About et le Pr Olivier Lesens, infectiologues au Centre Hospitalier de Cayenne